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L’une des grandes réflexions de la Bible concerne la vie et la mort : chaque mot est employé environ 1300 fois.. Pourquoi ? Parce que toute personne a reçu la vie et s’achemine inéluctablement vers la mort: voici deux évidences biologiques. Mais la Bible s’intéresse d’abord au sens de l’existence: elle n’hésite donc pas à parler des vivants comme de personnes spirituellement vivantes ou spirituellement mortes. D’où l’importance d’examiner les mots hébreux ou grecs qu’elle choisit et le contexte dans lequel ils sont employés. Si nous ne pensons qu’à la mort et à la vie biologiques, beaucoup de phrases deviennent pour nous soit incompréhensibles, soit franchement stupides.
• Dans un premier sens, vivre, c’est respirer, avoir en soi l’haleine de vie: mourir c’est rendre le dernier souffle. L’origine de la vie, c’est Dieu qui a insufflé l’haleine de vie. dès le premier vivant et lui a donné pouvoir de le transmettre de génération en génération. • Tout aussi concrètement, le sang constitue l’autre élément de la vie. Répandre le sang, c’est tuer la vie. Pour cette raison, l’AT interdit de manger la chair avec le sang. Quand on immole un animal pour les sacrifices, on recueille le sang pour le répandre sur l’autel qui représente Dieu, l’auteur de la vie. Quand Moïse veut sceller l’alliance avec Dieu, il répand une partie du sang sur l’autel et l’autre sur le peuple qui accepte l’alliance proposée. L’expression “la chair et le sang” désigne la personne laissée à elle-même, “née de la chair et du sang”. • Bien souvent, la Bible attire l’attention sur la conscience, sur le sens de l’existence. Ezéchiel dit ainsi :toute personne faisant le bien vit: toute personne se mettant à faire le mal meurt. Et si elle change de comportement, elle recommence à vivre. (Ez 18). Bien évidemment, ici, la Bible déborde largement le biologique pour parler d’une orientation spirituelle.. Dieu exhorte les humains à choisir la vie et le bonheur en refusant de choisir la mort et le malheur. (Deut 30). Dieu aime l’homme vivant; il est désolé quand il voit des personnes choisir la mort, autrement dit une existence sans aucune dimension intérieure. • Jésus parle de la vie selon l’un ou l’autre de ces significations. Quelques exemples. 1.Pour vivre il faut évidemment disposer de moyens de subsistance: nourriture, argent. D’où la nécessité de partager ces moyens pour ne pas laisser les pauvres dans le besoin. Beaucoup de textes bibliques demandent aux croyants de se montrer généreux dans cette répartition comme preuve de l’amour envers les proches, spécialement les plus démunis. Nous voici au plan du biologique, déjà très lié au sens de la relation spirituelle dans l’utilisation de nos avoirs.. 2. Jésus invite l’être humain à ne pas se préoccuper d’abord des biens de consommation. “Que sert à l’homme de gagner l’univers s’il en vient à ruiner sa vie , son âme?”(Mat 16.25). Le mot grec sous-jacent est alors “psykè” d’où est venu “psychologie”, ce qui habite notre coeur, notre âme, notre orientation d’existence. Jésus affirme donc: “Qui veut sauver sa vie la perdra. Qui la perdra à cause de moi la sauvera” (Mat 16.25) Ou encore: “Qui aime sa vie la perd et qui n’en tient pas compte (la hait) en ce monde la conservera en vie éternelle”. (Jn 12.25) . . 3.Dans l’expression “la vie éternelle” apparaît un troisième mot grec: zôè. C’est le mot le plus utilisé dans le nouveau testament pour parler de la vie. Le contexte est capital pour comprendre s’il s’agit de vie terrestre, biologique, que nous avons en commun avec les animaux (zoologie) - ou de la “vie éternelle”, cette qualité de l’âme donnant une dimension définitive à nos choix de vie. Cette vie éternelle comporte la foi en Jésus, fils de Dieu, l’amour de Dieu et des frères, et l’espérance d’une existence par-delà la mort physique. “Je suis la résurrection et la vie, dit Jésus à Marthe, qui pleure le décès de Lazare. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra. Et tout vivant qui croit en moi ne mourra sûrement pas pour l’éternité”. (Jn 11.25-26)
Quand Jésus affirme: “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis”, (Jn 15.13) il parle de l’amour qui lui donne la force psychologique de consacrer son existence au service de la foi et du salut des humains. Par amour, il transmet toutes les pensées de son Père qui le font vivre, toute sa psychologie pour qu’elle éclaire les croyants. Par amour, il a le courage de livrer librement sa vie entre les mains des pécheurs tout en sachant qu’ils réclameront sa mort. A Nicodème, Jésus dit: “Il faut être engendré d’en haut. Ce qui est engendré de la chair est chair.Ce qui est engendré de l’Esprit est Esprit”(Jn 3.6) . Façon de dire que nous avons deux vies: celle reçue de nos parents, et celle que l’Esprit de Dieu développe en nous. Celle-ci demeure éternellement, tandis que la première disparaît avec la mort terrestre. Nous pouvons ainsi mieux comprendre ce que Jésus dit sur l’eucharistie. Il se proclame pain donné par Dieu pour nourrir notre âme, notre sens des choses de la vie humaine. En écoutant ses paroles, en les mâchant dit l’évangile, nous devenons croyants, nous vivons de la foi.(Jn 6.59) En communiant à sa personne, autrement dit à “sa chair et à son sang”, nous développons notre vitalité spirituelle et religieuse. Le dynamisme incroyable de son amour nous est donné dans le Pain et le Vin de l’eucharistie. En les “mâchant”, la vigueur du Christ toujours vivant nous devient intérieure, et nous entrons dans la Vie même de Dieu. Il demeure en nous, nous demeurons en lui. Chaque eucharistie développe le germe de la vie éternelle en celui qui cherche à vivre selon la foi.. En communiant avec nos frères et soeurs nous resserrons avec eux nos liens d’affection fraternelle, d’unité, de partenariat, et nous recevons la force de pardonner à ceux qui nous ont blesés, offensés, fait du mal.
Ultime conseil: quand vous lirez désormais les mots “vie” ou “vivre”, et les expressions dérivées, “aimer la vie” “donner sa vie”, décuplez votre attention. Vous en serez alors persuadés: la Bible est bien une formidable invitation à la Vie Jamais elle le cultive l’instinct de mort. “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime”. Cela ne signifie pas en premier lieu: proposer de mourir pour eux. Il s’agit bien plus de livrer, de donner tout ce qui habite notre âme, les pensées qui nous font vivre et croire - de transmettre les secrets de notre bonheur de vivre pour que d’autres puissent en bénéficier. Il ne s’agit pas de s’immoler, mais de se consacrer à ce qui fait vivre ceux qu’on aime. Cela, nous le pouvons, jour après jour. Le Christ l’a fait. Il nous invite à pratiquer le même amour.. |
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